Hier soir sur France 5 a été diffusé le documentaire réalisé par Emmanuelle Ménage (production Magneto Presse) sur le thème de « Consommateurs pris au piège » (sous entendu pris au piège du marketing). Emmanuelle m’avait contacté en janvier et je peux témoigner que ce documentaire de qualité est le fruit d’un travail patient et sérieux sur cette thématique du multi-sensoriel. Je regrette toutefois un certain nombre de point de vue et de parti pris autour du documentaire…
Le premier est illustré par mon magazine télé évoquant ce document : « Tout est bon pour inciter le client à acheter, de la disposition des produits dans les rayons à l’utilisation de senteurs et de musiques. Mais en faisant appel aux neurosciences, le marketing vise à la manipulation parfaite du consommateur ». Heureusement, le site de France 5 est plus objectif et la présentation de la video moins « engagée » car le marketing sensoriel vise à créer des expériences d’achat agréables, mais il est déontologiquement mauvais et __légalement interdit__ de manipuler le consommateur : le marketing sensoriel, qu’il soit sonore ou olfactif ou visuel n’est pas une démarche manipulatoire. L’explication fournie par M. Pascal Charlier, Directeur Général d’Air Berger, est très claire à ce sujet et c’est un passage important. Même si elle est à mettre en rapport avec l’explication de Caroline Ardelet (spéciale dédicace Caro) qui rappellent que les recherches académiques ont démontrées que les « parfums connotent des implicitement des caractéristiques au produit : des collants parfumés vont paraître plus résistants, plus confortables. Mais c’est inconscient… les gens ne sont pas capables de [le] dire ». L’étude d’Air Berger, réalisée par BVA, montre que le marketing olfactif permet de changer la perception du point de vente et de modifier le comportement du consommateur. Il en va de même pour la musique, même si le documentaire aborde moins l’explication du lien entre musique et états émotionnels du consommateur puisqu’il se contente de montrer l’activité du leader français du secteur, MoodMedia à travers l’intervention de M. Claude Nahon (DG) et de M. Patrick Vidal (DJ, Playlister). Le documentaire montre toutefois bien les enjeux liés au tempo de la musique en fonction des heures de la journée et des jours de la semaine (cohérence situationnelle) et les aspects de congruence avec le produit ou avec le lieu. Enfin, j’ai beaucoup aimé la visite en « off » du magasin Abercrombie & Fitch des Champs-Elysées que j’avais recommandé à la journaliste car, pour moi, il constitue un archétype très fort du marketing poly-sensoriel poussé à l’extrême afin de constituer une expérience d’achat « hors norme ». Le documentaire montre très bien les techniques mobilisées par la marque (même si cet excès manifestement irrite certains parents). Le passage le plus à charge du documentaire est celui lié au neuro-marketing où je trouve que l’aspect manipulatoire est le plus mis en avant. Les techniques présentées sont les plus en pointe mais il est important de rappeler que leurs coûts sont très élevés, que généralement les études sont faites sur un faible nombre d’individus et que même si le « cerveau ne ment pas », il reste encore difficile de travailler sans le déclaratif du consommateur et l’analyse de son comportement en magasin ou face à un packaging. Pour ceux qui veulent aller plus loin sur ce sujet (qui nous éloigne un peu du marketing sensoriel magasin), j’ai d’ailleurs co-écrit un article sur le sujet du neuro-marketing, paru dans le Journal des Grandes Ecoles, il est reproduit [sur le site de TEMA|http://www.temablog.fr/?p=2656|fr|Neuro-Marketing]. Heureusement le documentaire se termine par l’exemple de Patagonia (et un magnifique coucher de soleil) qui a fait sien le positionnement tourné vers l’éco-responsabilité et qui donne des résultats business intéressants… ouf le marketing peut-être bon pour la planète ;-). Pour résumé, merci à France 5 pour ce reportage intéressant et bien construit (diffusé à une heure de grande écoute), même si on peut regretter un léger parti pris autour de la manipulation par le marketing, et une mise en avant un peu faible des limites des différentes techniques retenues… par exemple, je tiens à rappeler que la mise en musique seule d’un magasin avec une bande son hyper travaillée n’a aucun sens si le reste du concept ne suit pas (et réciproquement). Pour voir le documentaire, jusqu’au 20 mai, sur le site de [France 5|http://documentaires.france5.fr/documentaires/consommateurs-pris-au-piege|fr|Consommateurs pris au piège].
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