Les drives alimentaires connaissent depuis quelques années en France un succès croissant, leur nombre se chiffrant désormais à 3500, contre 250 en 2009. La rapidité de ce développement soulève plusieurs questions, notamment celle des conséquences de leur implantation sur le magasin existant.
L’ouverture d’un drive expose en effet l’enseigne mère à un potentiel risque de cannibalisation, certains clients pouvant peu à peu se détourner du magasin physique. Pour autant, elle peut également être l’occasion d’exploiter des synergies.
Pour explorer dans le détail les interactions entre les deux modèles, une étude a récemment été réalisée auprès de managers de magasins mais aussi de consommateurs, à travers des interviews individuelles et des focus groupe.
Il faut en fait distinguer deux types de drive : le drive accolé, situé directement à proximité du magasin initial, et le drive déporté, isolé de celui-ci mais potentiellement proche d’une grande surface concurrente. Si un drive isolé sera par nature moins dangereux, il réduit cependant le champ des possibles en termes d’intégration globale des canaux.
Les résultats montrent, en premier lieu, que la principale cause de migration des consommateurs réside dans la praticité offerte par le drive, qui associe un effort minimum à une grande rapidité.
L’enquête révèle également que le drive accolé permettra d’accroître la part de marché globale, mais pourra entraîner une baisse du chiffre d’affaires du magasin de 10 à 30%. Les drive déportés seront, eux, de nature à générer une rentabilité supérieure, mais à la condition expresse que l’enseigne jouisse d’une attractivité plus forte que celle de ses concurrents. La cannibalisation sera donc plus ou moins importante en fonction du type de drive ouvert.
Si l’on aborde maintenant la question des synergies, force est de constater qu’elles seront plus nombreuses dans le cadre d’un drive accolé. Il sera en effet possible de mutualiser les ressources en personnel, ou encore l’assortiment, là où un drive déporté proposera une plus large part de marques de distributeurs. Même chose pour la communication, qui nécessitera un budget spécifique dans le cadre d’un drive déporté, tandis que le drive accolé bénéficiera de celle du magasin physique.
En définitive, et quel que soit le modèle choisi, c’est finalement le développement de synergies entre les canaux qui sera la clé d’une amélioration globale de la performance, et qui permettra de se prémunir contre la cannibalisation par les enseignes concurrentes.
Source : Colla E. & Lapoule P. (2015), « Le drive, vecteur de cannibalisation ou de complémentarité ? Le cas de la grande distribution alimentaire française », Revue française du marketing n°252, pp. 55-70